La CECA (Communauté Européenne du Charbon et de l’Acier)

Réalisations et échecs de la Ceca

Sa mission (article 2) était générale: »contribuer à l’expansion de l’économie, au développement de l’emploi et à l’amélioration du niveau de vie » de ses citoyens. La Communauté a eu peu d’effet sur la production de charbon et d’acier, qui a été davantage influencée par les tendances mondiales. Les échanges commerciaux entre les membres ont en effet été multipliés par dix pour l’acier, ce qui a permis aux membres de réaliser des économies en n’ayant pas à importer de ressources des États-Unis. La Haute Autorité a également octroyé 280 prêts de modernisation à l’industrie, ce qui lui a permis d’améliorer sa production et de réduire ses coûts. Les coûts ont encore été réduits par la suppression des tarifs aux frontières.

Parmi les plus grandes réalisations de la CECA, on peut citer celles qui concernent le bien-être social. Certaines mines, par exemple, n’étaient manifestement pas viables sans subventions gouvernementales. Certains mineurs avaient des logements extrêmement médiocres. En 15 ans, elle a financé 112 500 appartements pour les travailleurs, payant 1 770 $US par appartement, ce qui leur a permis d’acheter une maison qu’ils n’auraient pas pu acheter autrement. La CECA a également payé la moitié des coûts de redéploiement professionnel des travailleurs qui ont perdu leur emploi à la suite de la fermeture des installations charbonnières et sidérurgiques. Combinée à l’aide régionale au développement, la CECA a dépensé 150 millions de dollars pour créer 100.000 emplois, dont un tiers pour les chômeurs du charbon et de l’acier. Les garanties sociales inventées par la CECA ont été étendues aux travailleurs en dehors du secteur du charbon et de l’acier par certains de ses membres.

Bien plus important que la création de la première politique sociale et régionale de l’Europe, il est affirmé que la CECA a introduit la paix européenne. Il s’agissait de la première taxe européenne du continent. Il s’agissait d’un impôt uniforme, un prélèvement sur la production avec un taux maximum de 1%. Étant donné que les pays de la Communauté européenne connaissent aujourd’hui la plus longue période de paix depuis plus de soixante-dix ans, cette taxe a été décrite comme la moins chère de l’histoire. Une autre guerre mondiale, ou « suicide mondial » comme Schuman appelait cette menace en 1949, fut évitée. En octobre 1953, Schuman dit que la possibilité d’une nouvelle guerre européenne avait été éliminée. Le raisonnement devait prévaloir parmi les Etats membres.

Toutefois, la CECA n’ a pas atteint plusieurs objectifs fondamentaux du traité de Paris. On espérait que la CECA empêcherait la résurgence de grands groupes charbonniers et sidérurgiques comme le Konzerne, qui a aidé Adolf Hitler à prendre le pouvoir. Dans les compromis de la guerre froide, les cartels et les grandes entreprises sont réapparus, ce qui a conduit à une fixation apparente des prix (un autre élément qui devait être abordé). Avec un système de surveillance démocratique, les pires aspects des abus du passé ont été évités grâce aux pouvoirs anti-cartel de l’Autorité, la première agence internationale anti-cartel au monde. Les entreprises efficaces ont été autorisées à prendre de l’expansion sur un marché européen sans domination indue. Le pétrole, le gaz, l’électricité sont devenus des concurrents naturels du charbon et ont également violé les pouvoirs des cartels. En outre, avec le passage au pétrole, la Communauté n’ a pas réussi à définir une véritable politique énergétique. Le traité Euratom a été en grande partie étouffé par de Gaulle et les gouvernements européens ont refusé la suggestion d’une Communauté de l’énergie impliquant l’électricité et d’autres vecteurs, suggérée à Messine en 1955. En cette période de forte inflation et d’instabilité monétaire, la CECA n’est pas parvenue non plus à garantir une péréquation à la hausse des salaires des travailleurs sur le marché. Ces échecs pourraient être imputés à une sur-ambition dans un court laps de temps, ou au fait que les objectifs étaient simplement des postures politiques à ignorer. On a fait valoir que les plus grandes réalisations de la Communauté européenne du charbon et de l’acier résident dans ses concepts démocratiques révolutionnaires d’une Communauté supranationale.